A Quiet Moment


Rowland Wheelright
(British, 1879-1955)
A Quiet Moment

Buen fin de semana, una pàgina tras otra y escapo del lío zurdo...😋 ✋👽🤚 "[...] para los adultos autistas, a menudo sólo existen lo que llamo las cuatro "P": padres, psiquiatría, prisión o paraíso" - Brigitte Harrison

Violence contre les personnes autistes

Photo noir et blanc d'une fille avec la tête entre les genoux
Adolescente autiste de 14 ans en retrait sensoriel (ou shutdown).

D'après les Pr Anne McGuire10 et Robert Chapman4, la violence reçue par les personnes autistes est fréquente et régulière, mais peu visible et peu prise en compte. Cette violence concerne tant le milieu médical que scolaire, professionnel, judiciaire ou familial27,53, et peut être physique ou verbale, comme l'illustre l'utilisation fréquente du mot « autiste » comme insulte, par exemple dans la langue françaiseP 5 et la langue anglaise58, en associant le handicap à une tareP 5. D'après deux chercheuses en sciences sociales de l'université de Kent (2015), les autistes sont, comme beaucoup de personnes en situation de handicap, souvent victimes de crimes haineux, et nombre d'entre eux vivent dans un sentiment de peur59.

D'après la recension effectuée par la Dr Katherine D. Tsatsanis (neuropsychologue canadienneB 8) en 2003, les enfants diagnostiqués « Asperger » sont plus souvent victimes de violences que tourmenteurs60. La violence contre les personnes autistes non-verbales est, elle aussi, favorisée du fait qu'elles sont dans l'impossibilité d'en parler et de la dénoncer53 : de façon générale, plus une personne est considérée comme étant « en situation de faiblesse », ou comme un cas « sévère », plus elle est vulnérable aux violences et à l'exclusion61,62. La dépendance est un facteur aggravant, notamment s'il faut un accompagnement quotidien pour les gestes courants (repas, toilette...)63. La « lourdeur » du handicap peut ainsi être invoquée pour justifier tous types de violences, y compris le meurtre64. D'après Cinzia Raffin, « certaines pratiques sexuelles aberrantes conduisant à des abus sexuels peuvent être déclenchées par la beauté de certains enfants ou adultes autistes jointe à leur incapacité de comprendre de quoi il s’agit » ; ainsi, dans un même article, les agressions sexuelles contre les autistes sont légitimées par leur beauté ou leur incompréhension du contexte sexuel, tandis que d'après l'auteure, « Stéréotypies et rituels [des autistes] deviennent une véritable torture pour les parents lorsqu’ils se trouvent contraints de les accepter »53.

Les parents d'enfants autistes sont eux aussi confrontés à de la violence dans l'annonce du diagnostic, les soins, la nécessité d'organiser leurs journées en l'absence de soutien du système scolaire et médico-social, et le jugement d'autrui sur leurs enfantsB 9.

À l'annonce du diagnostic

L'une des premières violences subies par les autistes est le refus du diagnostic : d'après la Dr Cinzia Raffin, « le fait d’utiliser des termes ambigus ou de retarder le diagnostic sous prétexte de ne pas « étiqueter » précocement l’enfant avec un diagnostic d’autisme, ce fait, cette conduite sont coupables du point de vue éthique [...], c’est faire comme si l’autisme était une chose répréhensible, un crime qui resterait inscrit au casier judiciaire »53. Des témoignages de parents français font état de violences dans l'annonce du diagnostic, de difficultés à l'accepter, et de remarques très négatives, par exemple de sages-femmes suggérant que les bébés autistes ne devraient pas vivre65.

En institution

Des témoignages et articles de presse font état de violences et de maltraitances contre des personnes autistes institutionnalisées. Les associations Vaincre l'autisme et SOS Autisme France se sont illustrées dans les années 2000 et 2010 par des accusations de maltraitance délibérée dans les établissements de soins françaisB 10. Le film documentaire de Sandrine Bonnaire Elle s'appelle Sabine (2007) montre la régression d'une femme autiste devenue plus violente pendant ses cinq années d'institutionnalisationB 11.

Ces témoignages dénoncent des négations des droits de l'homme, des personnes autistes sanglées de force sur des lits, forcées à faire leurs besoins sous elles, ou enfermées dans des cellules de 10 m2, voire dans des cages métalliquesB 11. En 2014, le Collectif autisme estime que 43,8 % des personnes autistes françaises sont ou ont été victimes de mauvais traitements dans les établissements dédiés à leur accueilB 11. D'après Sophie Le Callennec (spécialiste de l'adoptionB 12) et Florent Chapel (président du Collectif autisme et administrateur de la Fondation AutismeB 13), de fortes doses de médicaments leur sont administrées pour la tranquillité du personnel. Les raisons de ces mauvais traitements sont multiples, mais plus particulièrement dues au manque de personnel et à l'inexpérience des aides-soignantes livrées à elles-mêmesB 11.

Le docteur en psychologie Serge Dalla PiazzaB 14 cite (2007) des cas d'enfants autistes non-verbaux recousus de plaies à vif, au motif qu'ils n'auraient pas de perception de la douleur62. L'acte de défense de la personne autiste contre la douleur peut, de plus, être interprété comme relevant d'un acte de violence62. La sociologue française Brigitte Chamak fait état d'une plainte pour maltraitance contre un centre faisant appel aux techniques de thérapie cognitivo-comportementale. Ce fait a suscité peu d’écho médiatique66.

Dans le milieu familial

Gravure montrant une personne gardant un changeling enchaîné.
Le mythe du changeling aurait permis jadis de justifier l'abandon et le meurtre des bébés et enfants autistes par leur famille biologique67,68.

Dans le milieu familial, le manque voire l'absence de communication de la part des personnes autistes sont générateurs de violences de la part de l'entourage, en particulier des parents, qui peuvent être en attente d'un geste de tendresse, ou frustrés par le fait que la personne autiste porte davantage d'attention à un objet qu'à eux-mêmesB 4. La répétition de ces comportements sur une longue période est un élément important dans la survenue de violences par l'entourageB 4. Cependant, la maltraitance des enfants autistes par leur famille ne semble pas plus fréquente que la moyenne69. Les parents d'enfants autistes reçoivent souvent des remarques (violence verbale) en raison du comportement de leurs enfants, de la part d'inconnus qui ignorent l'autisme de ces derniersB 4.

Des cas d'infanticides, généralement commis par la mère de l'enfant autiste70, ont été documentés71. Des « douzaines » de meurtres sont mentionnés dans la presse occidentale en une dizaine d'années, en particulier la presse canadienne72. L'Autistic Self Advocacy Network en relève 36 (concernant tous des personnes handicapées, principalement autistes) en 2012. Anne McGuire souligne que chaque cas de meurtre est traité individuellement, mais que le motif général invoqué pour chacun d'entre eux est « l'autisme » ou « la vie avec l'autisme »73. Les témoignages à ce sujet insistent sur la sévérité supposée de l'autisme, et le désespoir ainsi généré74. Forme de violence extrême, le meurtre des personnes autistes par leurs proches se trouve justifié par la mauvaise perception publique de l'autisme, assimilé à une « pathologie à vie » qu'il convient de combattre75. D'après Anne McGuire, une partie de cette violence résulte du modèle médical de l'autisme, qui promeut une vision de l'autisme comme maladie à éradiquer ou anomalie à normaliser. La violence extrême est illustrée par les témoignages de meurtriers désireux de « tuer l'autisme », dans l'espoir de rendre leurs proches « normaux »76.

L'appartenance des parents à une classe sociale inférieure semble être un facteur prédisposant au meurtre, dans la mesure où ces mères infanticides n'avaient pas les ressources financières pour bénéficier d'accompagnements efficaces de leurs enfants handicapés77.

Dans le milieu scolaire

Lorsque les enfants autistes ont accès aux établissements scolaires, ils y sont souvent victimes de harcèlement78Stephen M. Shore note que les situations de violence exprimées par des personnes modèle médical de l'autisme Asperger et scolarisées sont précédées « d'une longue histoire de harcèlement et de mise à l'écart de la société par les camarades de classe »B 2. Environ 63 % des enfants scolarisés dans les écoles américaines et qui sont harcelés par d'autres enfants ont des troubles du spectre de l'autisme79. Les enfants et adolescents autistes sont également plus facilement pris pour cibles d'agressions sexuelles80, en raison de leurs difficultés à comprendre les rapports socio-sexuels27. Il existe aussi des cas d'agressions physiques et de vols27.

D'après une enquête de la fondation italienne Bambini e autismi, la violence scolaire reçue par les élèves autistes est assez rare, sinon absente, durant les années d'école maternelle et primaire. En revanche, elle est fréquente durant les années de collègeB 4. D'après Mohammad Ghaziuddin, cette violence scolaire est exacerbée à l'âge correspondant à la middle school (entre 9 et 13 ans)27.

La violence scolaire peut être facilement évitée grâce à une sensibilisation des élèves à ce qu'est l'autismeB 4, permettant de diminuer significativement les situations de harcèlementB 2.

Analyse sociologique du phénomène de capacitisme

D'après Anne McGuire, la société occidentale a derrière elle une longue histoire de violences et de discriminations contre les personnes autistes en particulier, et contre les personnes en situation de handicap en général10 :

« La voie dominante dans laquelle nous sommes engagés, sur le plan culturel, par rapport à l'autisme, en le combattant, en le haïssant, en menant une guerre contre lui, et en travaillant à son élimination, [cette voie] nous conduit à penser que l'autisme n'est pas en lui-même une manière de vivre, mais qu'il nous est imposé de vivre avecTrad 1 »

— Anne McGuire, Life without autism : a cultural logic of violence [La vie sans l'autisme : une logique culturelle de violence]81

Ce capacitisme, profondément enraciné, génère un phénomène d'exclusion10. Le sentiment de haine à l'égard du handicap est fréquent : d'après le pédopsychiatre Roger Salbreux, « la haine du handicap paraît un sentiment normal, une évidence même [...] cette haine semble également tout à fait compréhensible lorsqu’elle est éprouvée par les autres, les valides, ceux qui rencontrent et surtout qui entourent la personne handicapée, comme ceux qui sont chargés de la soigner ou de l’accompagner »82. Un phénomène de « psychophobie » assez proche génère une image négative des personnes schizophrènes83, dont les comportements décrits comme « dangereux » ressemblent à ceux décrits chez les personnes autistes46.

D'après Anne McGuire, l'assimilation de l'autisme à une « pathologie » indésirable et à combattre84, définie par une série de symptômes85, conduit de nombreuses personnes à penser qu'il puisse être guéri, rendant la personne autiste « normale », mais cette idée s’oppose au ressenti et au souhait de la plupart des personnes autistes elles-mêmes81. En ce sens, combattre l'autisme revient à combattre les personnes autistes86. Cela augmente fortement leur exposition aux actes de violence10.

Conséquences

L'exposition médiatique d'un lien entre autisme et violence est particulièrement dommageable sur l'opinion publique en matière d'autisme3 : d'après le psychologue australien Neil Brewer et son équipe, « l'exposition médiatique qui lie le crime et le trouble du spectre de l'autisme a favorisé des attitudes plus négatives à l'égard des personnes TSA, alors que le message éducatif positif sur le trouble du spectre de l'autisme a eu l'effet inverse »87. D'après le Dr en philosophie et sociologie (EHESS) Josef Schovanec, lui-même personne autiste, ce fantasme d'une association entre autisme et violence justifie à son tour les mauvais traitements infligés aux personnes autistesB 1 :

« En somme, bien des descriptifs de la violence que l'on aime à associer à l'autisme ne sont qu'autant de tableaux sinistres de nos propres défaillances et déficiences ou bien, pire encore, de la perverse volonté d'assigner ces dernières aux personnes qui en sont pourtant victimes. »

— Josef Schovanec, Autisme, la grande enquêteB 1

Deux études publiées dans les années 1990 ont déterminé qu'un taux important de personnes autistes sont détenues dans des hôpitaux de haute sécurité. D'après Katie Maras et al., cela résulte plus probablement de l'opinion publique qui les associe à un danger pour la société, que d'un comportement réellement dangereux ou violent3. Les autistes sont souvent arrêtés à tort par la police, en raison de comportements perçus comme étranges (stéréotypies), et sont plus vulnérables que les autres aux actes policiersA 4,15. Un article paru dans le quotidien québécois Le Soleil en septembre 2017 souligne que de nombreux adultes autistes arrivent en prison dans l'ignorance de la gravité de leurs actes, faute d'accompagnement préalable adapté pour leur apprendre des compétences sociales, ce qui conduit à une sur-judiciarisation de cette population, et ce dans tous les pays occidentauxP 6. Par ailleurs, une recension de la littérature scientifique relative à l'incarcération des personnes autistes, publiée en 2009, montre qu'il n'existe généralement aucun système d'accompagnement spécifique à l'autisme en prison18. Les personnes autistes qui ont été confrontées à un système de justice en gardent le plus souvent un mauvais souvenir12. L'empathie des personnes autistes ayant un fonctionnement particulier, leur attitude peut être perçue à tort comme de la froideur et une absence de remords, menant à un alourdissement des peines judiciaires prononcées45.

« [...] pour les autistes adultes, il n'y a souvent que ce que j'appelle les quatre "P" : les parents, la psychiatrie, la prison ou le paradis »

— Brigitte HarrisonP 6

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