Mélenchon,une promenade digestive.
Vladimir Mayakovsky by Alexander Rodtschenko, 1912.
Je viens d’entendre quelques extraits d’un discours de Jean-Luc Mélenchon. Je croyais (espérais) l’entendre annoncer la fin de sa vie politique : une espèce de pot de départ, bien mérité, à la retraite. Eh bien non : l’ex- trotskyste-lambertiste, ex-socialiste, toujours insoumis et à présent aussi « gilet jaune », est allé dire à ses militants : « J’y suis, j’y reste ». Pour le moment…
Dans ses paroles, il y avait un souffle lyrique. L’homme est sans doute relativement cultivé mais il cite à tort et à travers, notamment Gabriel García Márquez, se référant bien sûr à « Cien años de soledad », et aussi à « El general en su laberinto » (sur son bien-aimé et mythifié Simón Bolívar) et « Vivir para contarla » (dont le titre est horriblement mal écrit). Je ne doute pas qu’il ait lu les livres de « Gabo », le terrible ami et porte-parole de Fidel Castro. Pas comme son principal mentor, François Mitterrand, qui en parlait sans connaître sa littérature, qui devait l’ennuyer profondément, lui qui aimait surtout le « collabo » Jacques Chardonne et l’officier allemand Ernst Jûnger. Mitterrand a tout fait, avec sa femme Danielle, Régis Debray et Castro, pour faire obtenir à García Márquez le prix Nobel de littérature, pour des raisons strictement politiques.
Il est curieux de voir comment tous les admirateurs de Mélenchon (à gauche, et à droite aussi, cf. le défunt Jean d’Ormesson) célèbrent les connaissances littéraires de cet homme, qui déraille complètement lorsqu’il fait l’éloge de Fidel, de Chávez ou même de Maduro. Pour creuser un peu dans sa pensée, je suis allé voir sur son blog. Le 23 avril 2014, il dressait ainsi un vibrant éloge de « Márquez » (se référant ainsi à l’écrivain défunt, sans se rendre compte que, en espagnol, on cite les deux noms de famille et pas un, surtout pas seulement le deuxième) :
« C’est « La vie pour la raconter ». D’une phrase tout était dit, et le reste est venu comme une promenade digestive. Je ne peux manquer de recopier cette phrase, en ouverture de la première page : « La vie n’est pas ce que l’on a vécu mais ce dont on se souvient et comment on s’en souvient ». Rien n’est plus matérialiste que cette façon de considérer la vie comme une production sans cesse recommencée dans les compartiments de la mémoire et des lumières qu’on allume sur son présent et sur les futurs qu’on s’organise. Pardon pour ce jargonnage. Je ne sais pas mieux le dire. Je n’ai pas assez de Márquez dans le sang pour l’instant. »
Sa citation préférée est toujours la même : c’est celle qu’il distille en toutes circonstances, y compris pendant son meeting d’aujourd’hui, celui des adieux manqués. Mais, en parlant des « compartiments de la mémoire », il y a quelque chose de proustien. Et pourtant, dans son post, il écrivait ceci quelques lignes plus haut, toujours à propos de l’écrivain colombien :
« Je n’ai jamais rencontré personne qui m’en ait dit du mal, alors que je connais une palanquée de gens qui ont encore des bâillements rien qu’à entendre le nom de Proust. »
J’ai le regret de devoir vous contredire, M. Mélenchon. Je n’ai pas eu l’occasion de vous dire tout le bien que je pense de Proust et tout le mal que je pense de García Márquez (je n’ai eu qu’une fois, très brièvement, l’opportunité de vous balancer à la figure tout le mépris que j’avais pour Castro, « la voix de son maître »). Mais j’ai souvent écrit sur le peu d’estime que j’avais pour ce prix Nobel, dont la littérature, notamment certains de ses pamphlets mais aussi de ses romans, sont marqués du seau de l’infamie, de la soumission à la famille tyrannique qui détermine toujours le destin de Cuba.
Un conseil : retournez le plus vite possible à vos chères études. Lisez autre chose que les « vaches sacrées » latino-américaines, notamment l’œuvre du grand dissident et exilé cubain Reinaldo Arenas, qui ne portait précisément pas « Gabo » dans son cœur. Vous y acquerrez peut-être, enfin, un semblant de sagesse.
Dans ses paroles, il y avait un souffle lyrique. L’homme est sans doute relativement cultivé mais il cite à tort et à travers, notamment Gabriel García Márquez, se référant bien sûr à « Cien años de soledad », et aussi à « El general en su laberinto » (sur son bien-aimé et mythifié Simón Bolívar) et « Vivir para contarla » (dont le titre est horriblement mal écrit). Je ne doute pas qu’il ait lu les livres de « Gabo », le terrible ami et porte-parole de Fidel Castro. Pas comme son principal mentor, François Mitterrand, qui en parlait sans connaître sa littérature, qui devait l’ennuyer profondément, lui qui aimait surtout le « collabo » Jacques Chardonne et l’officier allemand Ernst Jûnger. Mitterrand a tout fait, avec sa femme Danielle, Régis Debray et Castro, pour faire obtenir à García Márquez le prix Nobel de littérature, pour des raisons strictement politiques.
Il est curieux de voir comment tous les admirateurs de Mélenchon (à gauche, et à droite aussi, cf. le défunt Jean d’Ormesson) célèbrent les connaissances littéraires de cet homme, qui déraille complètement lorsqu’il fait l’éloge de Fidel, de Chávez ou même de Maduro. Pour creuser un peu dans sa pensée, je suis allé voir sur son blog. Le 23 avril 2014, il dressait ainsi un vibrant éloge de « Márquez » (se référant ainsi à l’écrivain défunt, sans se rendre compte que, en espagnol, on cite les deux noms de famille et pas un, surtout pas seulement le deuxième) :
« C’est « La vie pour la raconter ». D’une phrase tout était dit, et le reste est venu comme une promenade digestive. Je ne peux manquer de recopier cette phrase, en ouverture de la première page : « La vie n’est pas ce que l’on a vécu mais ce dont on se souvient et comment on s’en souvient ». Rien n’est plus matérialiste que cette façon de considérer la vie comme une production sans cesse recommencée dans les compartiments de la mémoire et des lumières qu’on allume sur son présent et sur les futurs qu’on s’organise. Pardon pour ce jargonnage. Je ne sais pas mieux le dire. Je n’ai pas assez de Márquez dans le sang pour l’instant. »
Sa citation préférée est toujours la même : c’est celle qu’il distille en toutes circonstances, y compris pendant son meeting d’aujourd’hui, celui des adieux manqués. Mais, en parlant des « compartiments de la mémoire », il y a quelque chose de proustien. Et pourtant, dans son post, il écrivait ceci quelques lignes plus haut, toujours à propos de l’écrivain colombien :
« Je n’ai jamais rencontré personne qui m’en ait dit du mal, alors que je connais une palanquée de gens qui ont encore des bâillements rien qu’à entendre le nom de Proust. »
J’ai le regret de devoir vous contredire, M. Mélenchon. Je n’ai pas eu l’occasion de vous dire tout le bien que je pense de Proust et tout le mal que je pense de García Márquez (je n’ai eu qu’une fois, très brièvement, l’opportunité de vous balancer à la figure tout le mépris que j’avais pour Castro, « la voix de son maître »). Mais j’ai souvent écrit sur le peu d’estime que j’avais pour ce prix Nobel, dont la littérature, notamment certains de ses pamphlets mais aussi de ses romans, sont marqués du seau de l’infamie, de la soumission à la famille tyrannique qui détermine toujours le destin de Cuba.
Un conseil : retournez le plus vite possible à vos chères études. Lisez autre chose que les « vaches sacrées » latino-américaines, notamment l’œuvre du grand dissident et exilé cubain Reinaldo Arenas, qui ne portait précisément pas « Gabo » dans son cœur. Vous y acquerrez peut-être, enfin, un semblant de sagesse.
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