#TalDiaComoHoy en 1875 Nace Rainer María Rilke
#TalDiaComoHoy en 1875 Nace Rainer María Rilke, escritor austriaco.
Canción de amor
¿Cómo sujetar mi alma para
que no roce la tuya?
¿Cómo debo elevarla
hasta las otras cosas, sobre ti?
Quisiera cobijarla bajo cualquier objeto perdido,
en un rincón extraño y mudo
donde tu estremecimiento no pudiese esparcirse.
que no roce la tuya?
¿Cómo debo elevarla
hasta las otras cosas, sobre ti?
Quisiera cobijarla bajo cualquier objeto perdido,
en un rincón extraño y mudo
donde tu estremecimiento no pudiese esparcirse.
Pero todo aquello que tocamos, tú y yo,
nos une, como un golpe de arco,
que una sola voz arranca de dos cuerdas.
¿En qué instrumento nos tensaron?
¿Y qué mano nos pulsa formando ese sonido?
¡Oh, dulce canto!
Une rose seule, c'est toutes les roses
Une rose seule, c'est toutes les roses
et celle-ci : l'irremplaçable,
le parfait, le souple vocable
encadré par le texte des choses.
**********************************************************************
Lettre de Rainer Maria Rilke à Lou Andreas-Salomé
nos une, como un golpe de arco,
que una sola voz arranca de dos cuerdas.
¿En qué instrumento nos tensaron?
¿Y qué mano nos pulsa formando ese sonido?
¡Oh, dulce canto!
Une rose seule, c'est toutes les roses
Une rose seule, c'est toutes les roses
et celle-ci : l'irremplaçable,
le parfait, le souple vocable
encadré par le texte des choses.
Comment jamais dire sans elle
ce que furent nos espérances,
et les tendres intermittences
dans la partance continuelle.
Rainer Maria RILKE
ce que furent nos espérances,
et les tendres intermittences
dans la partance continuelle.
Rainer Maria RILKE
**********************************************************************
Lettre de Rainer Maria Rilke à Lou Andreas-Salomé
13 novembre 1905
Chère Lou,
Cela me touche étrangement qu’il y ait
maintenant une patrie autour de toi, une maison remplie de ta présence,
un jardin qui vit de toi, un espace qui t’appartient ; oui, je comprends
que tout cela ait été et n’ait pu qu’être lent à advenir : car ton
univers exige la réalité et a la force de l’exiger ; le premier et
lointain Loufried était presque comme un rêve, légèrement fragile et
plein de choses anticipées ; mais il tenait à toi, et quand tu venais,
la maison était grande et le jardin sans fin. C’est ce que j’éprouvais
alors, et je sais aujourd’hui que c’est justement l’infinie réalité qui
t’entourait qui constitua pour moi l’événement le plus profond de cette
époque indiciblement bonne, grande et généreuse ; le processus de
métamorphose qui s’empara alors de moi en mille endroits à la fois
émanait de ton existence indiciblement réelle. Jamais, dans mes timides
tâtonnements, je n’avais autant senti l’être, autant cru à la présence
et autant admis l’avenir ; tu étais l’antithèse de tous les doutes et
pour moi une preuve que tout ce que tu touches, atteins et regardes
existe. Le monde perdit pour moi son caractère nébuleux, cette façon
flottante de se former et de se décomposer qui fut la manière et la
pauvreté de mes premiers vers ; des choses advinrent, des bêtes que l’on
discernait, des fleurs qui existaient ; j’appris une simplicité,
j’appris avec lenteur et difficulté que tout est simple, et j’acquis la
maturité pour parler des choses simples.
Et tout cela se produisit parce qu’il
m’a été accordé de te rencontrer à un moment pour la première fois je
courais le danger de m’abandonner à l’informe. Et si ce danger ne cesse
de revenir d’une façon ou d’une autre et sous une forme de plus en plus
adulte, le souvenir de toi, la conscience de toi grandissent cependant
en moi au point de devenir immenses. A Paris, pendant ces journées
extrêmement difficiles où toutes les choses se retiraient de moi comme
d’un homme devenant aveugle, où je tremblais de l’angoisse de ne plus
reconnaitre le visage de mon prochain, je me raccrochais au fait que
toi, je te reconnaissais encore en mon for intérieur, que ton image ne
m’était pas devenue étrangère, qu’elle ne s’était pas éloignée comme
tout le reste, mais se maintenait seule dans le vide étranger où j’étais
contraint de vivre.
Et ici aussi, au milieu du déchirement avec lequel j’ai renoué, tu as été le lieu sûr auquel mon regard est resté fixé.
Je comprends si bien que les choses
viennent à toi comme les oiseaux retournent au nid lointain quand le
soir tombe. Mille lois, grandes et petites, se sont accomplies avec la
maison qui s’est construite autour de toi. Je suis si heureux qu’elle
existe, et j’ai l’impression que ses effets bienfaisants me parviennent
jusqu’ici.
Mon combat, Lou, et mon péril consistent
en ceci que je ne puis devenir réel, qu’il y a toujours des choses qui
me nient, des événements qui me traversent, plus réels que moi, comme si
je n’existais pas. Autrefois, j’ai cru qu’un mieux surgirait le jour où
j’aurais une maison, une femme et un enfant, toutes choses réelles et
irréfutables ; j’ai cru que cela me rendrait plus visible, plus
tangible, plus concret. Tu vois, Westerwede existait, était réel : car
j’ai construit moi-même la maison et tout fait à l’intérieur. Mais
c’était une réalité en dehors de moi, je n’étais ni intégré à elle ni
confondu avec elle. Et maintenant que cette petite maison avec ses
belles chambres silencieuses n’existe plus, le fait de savoir qu’il
existe encore un être lié à moi et quelque part un petit enfant qui n’a
rien de plus proche dans la vie que cet être et moi – cela me donne sans
doute une certaine sécurité et l’expérience de beaucoup de choses
simples et profondes -, mais cela ne m’aide pas à parvenir à ce
sentiment de réalité, à cette égalité de condition à laquelle j’aspire
tant : être quelqu’un de réel au milieu du réel.
C’est seulement pendant mes journées de
travail (fort rares) que je deviens réel, que j’existe, que j’occupe
l’espace comme une chose, pesant, gisant, tombant, et puis une main
vient me relever. Inséré dans l’édifice d’une grande réalité, j’ai alors
le sentiment d’être un élément important, posé sur des fondations
profondes, encadré à droite et à gauche par d’autres portants. Mais
chaque fois, après ces moments d’insertion, je redeviens la pierre
rejetée au loin, si inerte que l’herbe de l’inaction a le temps de
pousser sur elle. Et le fait que ces moments de rejet ne se fassent pas
plus rares, mais soient au contraire quasi constants, ne doit-il pas
m’angoisser ? Si je gis ainsi, complètement enseveli, qui me retrouvera
sous tout ce qui me recouvre ? Et n’est-il pas possible que je me sois
depuis longtemps effrité, presque pareil à la terre, presque aplani, si
bien qu’il y a toujours un morne chemin de traverse pour me passer
dessus ?
Il y a donc constamment devant moi cette
unique tâche à laquelle je ne m’attèle toujours pas, bien que je doive
le faire : trouver le chemin, la possibilité d’une réalité quotidienne…
J’écris cela, chère Lou, comme dans un
journal intime, tout cela parce que je ne peux pas écrire de lettre
maintenant mais n’en suis pas moins désireux de te parler. J’ai presque
perdu l’habitude d’écrire, aussi pardonne-moi si cette manière de lettre
est détestable et désordonnée. Peut-être n’y voit-on même pas qu’elle
est emplie de joie à la pensée de ta maison et y apporte mille voeux.
Mille. Tous.
Rainer.
Commentaires