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Islam: le dangereux discours de la Mosquée de Paris

Dalil Boubakeur et le mépris des autres religions

Aurélien Marq
Polytechnicien et haut fonctionnaire chargé de questions de sécurité intérieure
Publié le 28 juin 2017 / Religion

Le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, mars 2016. SIPA. 00747802_000005
On sait que plusieurs instances prétendument représentatives de « l’islam de France » sont de ferventes adeptes du double discours, à l’image du CFCM. On sait moins que la Grande Mosquée de Paris et son célèbre recteur Dalil Boubakeur sont hélas aussi de ceux pour qui le respect de l’autre n’est qu’une façade.
Sur le site internet de la Grande Mosquée, on trouve toutes sortes d’articles se proposant d’expliquer ce que sont l’islam, sa foi et ses croyances. Ces textes sont, dans l’ensemble, écrits dans un très bon français, ce qui permet de supposer que les mots employés n’ont pas été choisis par hasard.

Mépris des autres religions

Or, on y trouve des affirmations qui laissent pantois, et se distinguent par un mépris affiché envers les autres religions, et une troublante vindicte à l’égard du judaïsme en particulier.
Dans un article intitulé « connaissance de l’Islam » et signé Dalil Boubakeur, on peut lire :
« L’Islam condamne le vice et glorifie la vertu, (…) interdit le fanatisme et les passions criminelles, la haine, le racisme, la cupidité, les superstitions, les pseudo miracles, le culte des idoles, les représentations figurées de Dieu, l’attachement excessif aux vaines richesses de ce monde. (…) le paganisme, les absolutions de péchés, sont frappés par l’Islam d’une condamnation majeure en tant qu’imposture flagrante. (…) Il n’y a pas de place en Islam pour les confessions, (…) ni tous ceux qui en un mot, cherchent dans la religion (…) un moyen d’abêtir les masses au point de les rendre sourdes et aveugles devant l’égarement, l’erreur et l’injustice. »
Que l’Islam refuse les « représentations figurées de Dieu » est une chose. Que celles-ci soient mises sur le même plan, dans la même énumération, que la haine, le racisme et la cupidité, en est une autre ! De même pour les confessions associées à l’abêtissement des masses.
Car le choix des mots est fondamental : « le paganisme, les absolutions de péchés, sont frappés par l’Islam d’une condamnation majeure en tant qu’imposture flagrante ». Païens, catholiques ou orthodoxes apprécieront : selon ce texte, l’islam ne désapprouve pas ce qu’il considère comme une erreur mais « condamne une imposture flagrante ». Or, contrairement à l’erreur, l’imposture suppose la volonté consciente de tromper. Dire que quelque chose est une « imposture » revient à dire que ceux qui défendent cette imposture sont des imposteurs.

La Bible tournée en dérision

Dans un autre article, qui se propose de présenter Jésus vu par l’Islam, est écrit :
« Jésus avait naturellement ses préférences, en particulier pour Jacques et Jean (…) Avec Simon Kaïfa (le futur Pierre) ils formaient une sorte de comité intime parmi ses adeptes, lesquels étaient d’une naïveté et d’une ignorance extrêmes. » ou encore « Ces raisonneurs impénitents qu’étaient les docteurs grecs, (…) et des dissertations filandreuses de la scolastique médiévale, surchargée de mythes, de superstitions, de subtilités, de mystères inutiles et de contradictions »
Je ne me prononcerai ni sur les qualités intellectuelles des Apôtres, ni sur les mérites de la scolastique médiévale, mais il me semble que si le site internet d’un évêché proclamait que les compagnons du prophète de l’Islam étaient « d’une naïveté et d’une ignorance extrêmes », et parlait des « dissertations filandreuses » des théologiens musulmans du Moyen-âge, les réactions ne se feraient pas attendre !

De la “stérilité” du polythéisme

Dans l’article sur Moïse, on lit au sujet du paganisme :
« La condamnation d’un polythéisme (qui n’était pas toujours grossier notamment chez les Grecs) dont la stérilité, l’illusion, l’incohérence étaient, certes, patentes d’une part, et d’autre part la proclamation d’une divinité unique et transcendante, furent précisément les deux composantes de la mission surnaturelle de Moïse. »
Au risque de souligner l’évidence, je ne crois pas que soit « patente » une quelconque « stérilité » de l’ancienne religion égyptienne !
Le trésor de Toutankhamon, le Livre des Morts ou les temples de la Vallée du Nil me semblent au contraire les marques d’une tradition religieuse d’une très grande richesse intellectuelle et artistique.
La généralisation de la formulation, en outre, impose de rappeler la créativité magnifique de nombreux autres polythéismes à travers le monde, à commencer évidemment par l’Hellénisme, de Homère à Phidias, en passant par Pythagore et Hippocrate.
Enfin, puisque le polythéisme est « condamné », quelle place l’auteur de ce texte envisage-t-il au sein de la République pour nos concitoyens polythéistes, qu’ils soient hindouistes, shintôs, bouddhistes ou druides ?

Les “faussaires” judaïques

Ce dédain mêlé d’hostilité se dégage aussi des commentaires sur le judaïsme, notamment dans l’article consacré à Abraham.
Le texte disserte longuement sur une question qu’il estime fondamentale : quel fils, d’Isaac ou Ismaël, devait être sacrifié ? Querelle de préséance, obsession de fonder sur cette question une légitimité à se dire les véritables héritiers d’Abraham au détriment des Juifs.
Le rédacteur écrit donc :
« les légendes immorales, les invraisemblances et les niaiseries de la Bible doivent être sinon acceptées, du moins jugées de bon cœur et avec une indulgence souriante. »
Quant à la circoncision : 
« L’islam rejette comme grossièrement naïve et prétentieuse toute idée d’alliance avec Dieu fondée sur l’écoulement du sang des parties génitales » 
« Selon la Genèse, le « candidat » à l’immolation était Isaac. Selon la thèse musulmane, il s’agit d’Ismaël. Les sémitisants (…) ont souligné cette falsification et considèrent, en outre, les chapitres suivants surtout le chapitre XXII, comme transformés et pratiquement vidés de leur substance, à cause des compilateurs tardifs des traditions juives qui se sont évertués, en arrangeant les textes à leur manière, à faire d’Isaac et de son fils Jacob les seuls dépositaires de la révélation et les seuls fondateurs du culte. Pour rendre cohérente la narration biblique et leur conception de la prophétie comme un privilège exclusif d’Israël, ils ont modifié le Texte sacré et substitué Isaac à Ismaël. »
« Le faux ressort d’ailleurs du style « ton fils unique, celui que tu aimes, Isaac, etc. ». Cette insistance et ces précisions nullement indispensables trahissent à elles seules chez le faussaire anonyme, une détermination intéressée et donc obstinée, à convaincre ses lecteurs, malgré la matérialité des faits, d’une contrevérité patente. »

L’entretien d’un climat d’hostilité

A nouveau, le choix des mots. Après avoir refusé de prendre au sérieux le texte commenté :« les invraisemblances et les niaiseries »« grossièrement naïve et prétentieuse », on en condamne les intentions : « falsification »« se sont évertués, en arrangeant les textes »,« faussaire »« détermination intéressée et donc obstinée »« contrevérité patente ».
L’hypothèse de deux traditions différentes mais toutes deux sincères n’est même pas envisagée : la tradition juive ne peut résulter que d’un mensonge conscient et volontaire.
Certes, il n’y a pas là à proprement parler d’appel à la violence. Mais est-il vraiment opportun, après Merah et Coulibaly, de diffuser ainsi l’idée selon laquelle les Juifs auraient sciemment falsifié les textes sacrés pour usurper une place qui ne devrait pas leur revenir ?
A tout le moins, par de tels écrits la Grande Mosquée de Paris contribue à entretenir un climat d’hostilité, qui ne peut que favoriser d’éventuels passages à l’acte antisémites.
Dalil Boubakeur, convive habituel des cérémonies officielles, est-il christianophobe, paganophobe et antisémite ? Ou a-t-il tellement l’habitude de telles attitudes dans son entourage qu’il les juge banales, et estime de bonne foi modérés des messages de mépris et de condamnation ?

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